mardi 29 janvier 2019

Le fil(s)


Ce matin j’observe mon fils devant la glace
espiègle petit bonhomme
qui se lave les dents
l’air heureux
je suis à mon tour
à la place de mon père
il y a quarante ans
j’étais ce même petit bonhomme
facétieux
et je pense à mon père qui est vieux
aujourd’hui
et ce père c’est moi aujourd’hui
je suis aussi soucieux
que lui
à son âge
et son père qui était mon grand-père
adoré à son âge
n’était déjà plus là
lui
était-il aussi préoccupé
de nous donner
sans discontinuer
autant d’amour ?

lundi 28 janvier 2019

Malgré mon poing levé

tag-ecole

Le bus a filé devant mon nez
j’ai pris le suivant avec une meute
de collégiens en rut
je n’avais plus anglais renforcé
(que j’avais pris d’ailleurs pour échapper à l'allemand 3e langue
et passer la première heure
sous la table
à zyeuter les porte-jarretelles
soyeux de Mme G.)
j’ai réentendu le mot
« bâtard »
aussi
pris un sac de fille sur le coin de la figure
Le collège avait été tagué
lui aussi
sans qu’il s’agisse d’une tentative convaincante
de Street art
comme avant
si peu de choses avaient changé
(finalement).


mercredi 23 janvier 2019

Créer

avec :
creer
Jean Claude Ameisen
Maylis de Kerangal
Amélie Nothomb
Jean Nouvel
Denis Podalydès

Angelin Preljocaj
Joann Sfar

Coédition L'iconoclaste / France Culture, 2018
20 Euros


Un choix de masterclasses diffusées sur France Culture où des artistes de toute discipline  (écrivains, architecte, comédien, chorégraphe, auteur de BD) et un scientifique explorent la notion de création. Ils retracent leur parcours personnel en livrant anecdotes et réflexions.

Beaucoup aimé les témoignages de Maylis de Kerangal sur sa « fabrique » de romancière et de Joann Sfar (notamment), comme le fait de partager l'intimité des créateurs...

lundi 21 janvier 2019

La vengeance de la pelouse


Dans mon rêve
elle me suit à scooter
en maillot de bain
deux pièces
elle a un corps parfait

elle sourit
c’est l’été

je la photographie
pour immortaliser
la scène
au-delà de mon crâne en feu

Mais le cliché ne cadre
que la naissance
de sa petite poitrine délicieuse

(C’est déjà beaucoup)

j’aime bien ce polaroid-là
qui n’existe pas en vrai

et pourtant plus vrai que nature.


samedi 19 janvier 2019

Blaise Cendrars (1887-1961)


Conseil de Blaise Cendrars à Philippe Labro, alors jeune journaliste au magazine Arts, pour lequel il réalise un reportage haut en couleurs sur l’écrivain suisse :

« Soyez optimiste. Voyagez. Évitez de devenir des fonctionnaires de la plume. Restez près de la vie. »


blaise-cendrars
Blaise Cendrars, le formidable poète à la main coupée

© Collection privée F-X Farine.

lundi 14 janvier 2019

Je me souviens #20


Je me souviens du jour où, en vacances dans le Sud-Ouest, nous breakions et smurfions dans la salle de ping-pong du camping municipal avec Thierry Fraysse, Jérôme Patersik alias Pater, le Chinois du 93 et son gros poste Megabass. Le lendemain, au réveil, dans la caravane Adria, mon cou a fait « craaac ! ». J'ai hurlé de douleur. Attendu vainement le retour de mes parents partis faire du cyclotourisme, la tête calée sous mon poing, toute la matinée. À 13 heures, nous étions enfin aux Urgences de l'hôpital de Villeneuve-sur-Lot. Je m'étais déplacé sept vertèbres. Rééducation et bains de boue pendant 15 jours. À l'époque, je tournais sur la tête en faisant deux tours et demi. (Partie de breakdance perdue 1983-84)

*

 (Courts textes en cours, 2011-.... - © François-Xavier Farine.)

mercredi 9 janvier 2019

Quelques gardes du corps repérés, en juin dernier, au Marché de la Poésie

Un beau souvenir, immortalisé par le zoom fureteur de Claude Vercey, et que celui-ci m'a récemment envoyé...

© Photo Claude Vercey, 2018.

Prochain recueil de Thomas Vinau :
C'est un beau jour pour ne pas mourir : 365 poèmes sous la main, à paraître le 7 mars 2019, au Castor Astral.


2e recueil de Marc Guimo :
La poésie, personne n'en lit (juin 2018) disponible aux éd. de La Boucherie littéraire.


Le dernier recueil de NATYOT est un Vrai roman paru sous pseudo :
Le Nord du Monde (août 2018) disponible aux éditons La Contre-allée.


lundi 7 janvier 2019

Les éditions GLM par Rémy Sandy

J'ai découvert sur le web le passionnant mémoire de Master 2 de Rémy Sandy consacré à l'éditeur Guy Lévis Mano (alias GLM) et à l'aventure des éditions poétiques du même nom.

Voici un extrait-confidence qui concerne plus particulièrement les rapports des poètes surréalistes avec l'éditeur, lequel m'a bien fait sourire :


les-surréalistes
Environ 40% des livres parus chez GLM entre 1935 et 1939, revues comprises, présentent des textes ou des images de surréalistes tels que Paul Éluard, André Breton, Valentine Penrose, Gisèle Prassinos, Philippe Soupault, Benjamin Péret, pour ne citer qu’eux. Du côté des peintres, Guy Lévis Mano rencontre notamment André Masson, Salvador Dalí, Joan Miró, Max Ernst, Pablo Picasso ou Yves Tanguy. Il est toutefois bon de rappeler que Lévis Mano n’a jamais adhéré au groupe surréaliste, et qu’il publie bien d’autres poètes indépendants de tout mouvement littéraire. Les relations avec les surréalistes n’étaient d’ailleurs pas de tout repos, car ces derniers manifestaient des exigences particulières qui ne facilitaient pas les ententes.
André Breton était peut-être le moins docile comme en témoigne la condition qu’il posa à paraître au catalogue GLM : l’éditeur dut promettre de ne pas accepter Louis Aragon, avec qui la rupture avait été consommée, et Jean Cocteau qu’il ne supportait pas.
GLM se plia à la demande de Breton dans la mesure où lui-même n’aimait guère la poésie des deux écrivains. Mais il ne gardait pas toujours un très bon souvenir de cette époque tumultueuse, du fait des complications qu’amenaient des considérations personnelles au sein des projets éditoriaux. Lorsque Jean-Marie Dunoyer l’interroge sur ses rapports avec les surréalistes, Lévis Mano donne la réponse suivante :
« Passionnants. Parfois difficiles. Des brouilles subites, impardonnables, éclataient entre eux. Quand l’un était dans le magasin et que survenait l’autre avec lequel il était en froid je m’arrangeais pour l’expédier dans l’atelier. Certains, bien sûr, étaient très gentils : Éluard, Char. Mais les autres... » Les autres se laissaient parfois dominer par des engagements pour le moins... surréalistes, en effet. Quoiqu’il en soit, les poètes trouvaient un certain confort chez GLM. La disparition de certains éditeurs les y mena, mais il y a avait une autre raison à cela, car des auteurs comme Breton ou Éluard étaient suffisamment connus pour être acceptés chez José Corti ou Gaston Gallimard. Quelle est-elle ?
 

     Si ce n’était pour des questions d’argent ou d’adhésion à leur mouvement que les surréalistes vinrent aux éditions GLM, c’était pour le poète et l’artisan d’exception que figurait Guy Lévis Mano. Nous soulevons l’exemple de ce groupe d’artistes, mais des poètes comme Pierre Jean Jouve ou Jean Follain répondaient à des attirances semblables. De même, nous évoquons de façon prioritaire les années 1930 parce qu’elles signent une reconnaissance des éditions GLM qui n’est pas mise en doute par la suite. Ainsi GLM avait-il du succès auprès des poètes parce qu’il savait lire la poésie et prenait le temps de le faire. Il faisait preuve d’une grande attention envers le texte – et du même coup envers l’auteur – dans le but de pouvoir lui offrir l’habillage qui lui revient. La lecture du texte pour GLM avait partie liée avec la mise en pages qu’il allait en proposer, si bien que les poètes développaient un attrait pour le typographe. (...)

Consulter le mémoire de Rémy Sandy : 
L’œuvre typographique et éditoriale de Guy Lévis Mano : un acte d’allégeance à la poésie (juin 2009)

dimanche 6 janvier 2019

Bien vu tout ça ?

rocky-balboa
« Plus le taux de démocratie est proche de zéro, plus cela entretient et amplifie une violence réactive (contenue ou au contraire explosive). »
Jean Bernabé, écrivain martiniquais (1947-2017)


J'ai bien vu Rocky sur le Pont Sédar-Senghor 
à Paris
vu aussi des flics castagner le peuple
un commissaire de police

jouer au père La Morale
au lieu de rester tout nu dans son slip

j'ai vu un Président cynique
et immature parler avec des mots
d'hier des mots vieux comme le monde

qui se foutent bien de la jeunesse
et de la misère réelle des gens
j'ai vu le feu des flash-balls, des gaz lacrymo,
les matraques et les boucliers
essayer d'éteindre la rage du pays
et des journaleux tirer la couverture
dans le sens ténu du poil
sans plus aucun discernement
j'ai aussi vu l'arrogance du pouvoir
expliquer où était le bien
et la juste mesure des choses
avec une insoutenable légèreté
qui me fait sortir les crocs
Je n'ai pas rêvé

j'ai bien vu
que le monde tournait
mal
que les puissants continuaient d'écraser
l'insurrection
avec autre chose
qu'un simple chariot élévateur.