Ce mercredi-là, un concours de Chanson Française avait été organisé par la Petite Cave au Théâtre Sébastopol de Lille. Des chanteuses et des chanteurs se produisaient alors sur scène. C’était le meilleur du pire. Le maître de cérémonie, un petit homme grisonnant, sorte de Jacques Martin local, en faisait des tonnes. Il avait même placé son poulain parmi les candidats, un Francis Cabrel de seconde zone en chemise à fleurs, qui avait copié jusqu’à la moustache de son idole. Un de mes amis, auteur-compositeur, figurait parmi le jury car, à cette époque, il cachetonnait pour la Petite Cave, en reprenant des chansons inédites de Brassens, pendant que les convives du restaurant se bâfraient allègrement, sans même y prêter attention.
Parmi les candidats, certains me marquèrent plus que d’autres. Notamment cette blonde aux formes plantureuses qui chantait trop fort sur une bande-son - comme toutes ces chanteuses à voix du moment, et un certain Chinaski qui avait chanté Bukowski et un « autoportrait au radiateur ». Après que le jury ait délibéré, je vis soudain mon pote s’éclipser de la scène par le rideau de derrière. Le maître de cérémonie annonça le résultat et tendit sans surprise le prix à son poulain. Les esprits s’échauffèrent rapidement. Des sifflets et des cris de désapprobation montèrent des quatre coins de la salle et, sur scène, les candidats ulcérés criaient à l’injustice et à la mascarade, et l’un d’entre eux avait même empoigné le maître de cérémonie en s’apprêtant à lui donner un solide coup de poing, comme dans une scène de saloon.
Avant que cela tourne au pugilat généralisé, je décidai de quitter le théâtre pour aller boire un coup dans le bar d’en face avec mon meilleur ami qui était moins dépité que moi, par ce prix truqué, où le tenancier de ce cabaret-spectacle avait surtout voulu se faire un gros coup de pub, complètement manqué, et qui, en plus, avait certainement dû se solder par un savoureux œil au beurre noir. (Pas La Fine Fleur de la chanson française)
© François-Xavier
Farine, textes inédits (2011-….)
tres captivant j'ai lu jusqu'à la fin merci
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