lundi 27 février 2017

Vian (1920-1959) & Gainsbourg (1928-1991) : « T’as tout dans la peau ! »

© visuel Médiathèque départementale du Nord

Dans le cadre du 19e Printemps des Poètes qui a lieu du 4 au 19 mars 2017, la Médiathèque départementale du Nord propose, en partenariat avec la nouvelle médiathèque Louis Aragon d'Auby, un spectacle gratuit de poésie-chansons consacré à ces deux auteurs majeurs du XXe siècle.

Une création originale de :

Lulu Socrate, performeuse burlesque
Jonathan Bois, accordéoniste, chanteur
Mickaël Knockaert, trompettiste et théâtre de rue

dont ce sera, d'ailleurs, la première représentation.


Samedi 11 mars à 20 h 30
Médiathèque Louis Aragon
L’ESCALE Place de la République
59950 AUBY

Renseignements et réservation :
03.27.95.26.68 ; mediatheque@auby.fr

Gratuit dans la limite des places disponibles.
Public adulte.


Hé, Ho, viendez, ok ?
Ça va être bon !



du Chant à la une !... (1958), premier album
aux chansons poético-réalistes de Serge Gainsbourg
préfacé par Marcel Aymé et chroniqué par Boris Vian lui-même
à l'époque dans Le Canard enchaîné

jeudi 23 février 2017

Coaching personnalisé

François-Xavier Farine
 à Heptanes Fraxion

Si je me vends mieux
je mange mes 5 fruits et légumes par jour
si je salue mon prochain
alors qu'il m'écrase les pieds dans le métro
(comme une merde de paillasson)
si je connais les préceptes des 25
religions
le classement des équipes du Championnat de France
de football et de pétanque dans l’ordre
et dans le désordre
si je récite par cœur
tous les noms des dictateurs
et des charlatans qu’il faudrait
trucider plutôt qu’instrumentaliser
si je milite pour les 150 heures de travail
hebdomadaire en comptant le travail la famille le courage
la maison les amis les ennemis la poésie à entretenir le déficit
du sommeil et l’abrutissement collectif
si je parle aux francs-maçons aux clodos aux déportés
aux gravures de mode à mon frangin à mon kiné mutique
à ma moto de compétition et à mon ange gardien
si je piétine les morts
la pluie le déluge
et que je remue leurs cendres encore chaudes
dans mon ventre
et que j’embrasse tendrement follement goulûment
les vivants
es-ce que je suis sauvé
est-ce que je suis
sauvé ?

mercredi 22 février 2017

Rions avec les poètes !


Jean-Yves PlamontMême si les poètes d'humour ne sont pas légion, j'ai choisi aujourd'hui de vous parler de deux d'entre eux : Jean-Yves Plamont et Jean-Luc Caizergues.

Jean-Yves Plamont le pole magnétiqueNé en 1960 à Lille où il est bibliothécaire, Jean-Yves Plamont se définit avec le sourire comme un « cartoonist de l'extrême ».
Il est le plus neuf parmi 5 poètes d'humour d'aujourd'hui : Guy Chaty, Michel Deville, Alfonso Jimenez, Jean L'Anselme (1919-2012) et lui-même auxquels j'avais consacré un dossier en novembre 2006 dans la revue Lieux d'Être n°42, alors que ce dernier était encore totalement inconnu et inédit.

En 2008, je rédigeais la chronique de son premier recueil, Pour mon ours blanc, publié au dé bleu dans la collection du farfadet bleu, collection jeunesse reprise depuis par Hélène Boinard au sein des éditions Cadex.


En octobre 2016, Jean-Yves Plamont a sorti un second recueil, Le Pôle magnétique (composé de trois micro-recueils), tout aussi original, que je vous invite à acquérir sans plus attendre.
C'est un livre drôle, décalé, sensible et réjouissant, dans lequel l'auteur se moque de lui-même autant que des complexités de l'écriture. Cet auteur a digéré Brautigan, Soupault et les meilleurs surréalistes belges. Il compose de petites histoires sous forme de tercets-haïkus, proche de l'univers des dessins animés.

Quand un auteur séduit coup sur coup Jean Orizet, Jean L'Anselme, Louis Dubost et Daniel Fano, cela vaut peut-être le coup d'aller y jeter un coup d’œil de plus près, non ?


jean-luc caizergues mon suicide
Né en 1954, machiniste à l'Opéra de Montpellier, Jean-Luc Caizergues est un autre phénomène qui a retenu mon attention, depuis la sortie de son second recueil, Mon suicide : poésie-fiction, chez Flammarion en 2008 et pourtant je n'avais hélas encore jamais parlé de cet auteur si singulier jusqu'à aujourd'hui ! J'adore son livre à l'humour noir, très grinçant, « à la Topor », qui met notamment en scène - sous forme de très courtes séquences de poèmes - une succession de morts, l'air de rien, ou de petites violences ordinaires qui éclairent d'une lumière crue notre pire aujourd'hui :

LE BON ET LE MÉCHANT

Un policier
me frappe
à coups
de poing

pour
me faire
parler. Un
autre à

coups de
pied pour
que je
me taise.


UN RAYON DE SOLEIL

Ma femme
se précipite
dans le garage
envahi

de gaz d'échap-
pement. Elle
extrait mon
cadavre

de la voiture,
se met au
volant et file
à la plage.


Qui sont les principaux poètes d'humour d'hier et aujourd'hui ?

Citons pêle-mêle : Boris Vian (1920-1959), Raymond Queneau (1903-1976), Jean Tardieu (1903-1995), André Frédérique (1915-1957), Pierre Chabert (1914-2012), Jean L'Anselme (1919-2012), Paul Vincensini (1930-1985), Norge (1898-1990), Jacques Simonomis (1940-2005), Roland Dubillard (1923-2011), Roland Bacri (1926-2014), Odile Caradec (née en 1925), l'Académicien René de Obaldia (né en 1918), Michel Deville (né en 1931), Alfonso Jimenez (né en 1933), Guy Chaty (né en 1934), l'inénarrable poète belge Jean-Pierre Verheggen (né en 1942), Jean-Claude Touzeil (né en 1946), Michel Monnereau (né en 1948), Jean-Luc Caizergues (né en 1954),
Éric Dejaeger (né en 1958), Jean-Yves Plamont (né en 1960) et Simon Allonneau (né en 1985).

L'anthologie, Les poètes et le rire, de Jean Orizet, plusieurs fois rééditée au Cherche midi éditeur, finira de vous combler si vous souhaitez pousser l'exploration un peu plus loin.

À signaler également :

- l'anthologie, En rires, établie par Christian Poslaniec et parue chez Seghers en 2009.

- la sortie imminente, le 1er mars prochain, de Perles de vie du poète presque centenaire
René de Obaldia.

Comme quoi, la poésie d'humour conserve ! À méditer donc pour tous les grincheux !

vendredi 17 février 2017

Yves Artufel mis à l'honneur

Yves Artufel
Chiendents n°116 - Janvier 2017
Georges Cathalo a orchestré  et préparé le numéro 116 de la revue Chiendents consacré à un éditeur-poète très discret mais efficace : Yves Artufel.
 

Ce cahier d'une quarantaine de pages vient juste de paraître aux éditions du Petit Véhicule de Luc Vidal.

Je ne vais pas vous détailler le riche sommaire de toutes les contributions de ce numéro-hommage à Yves Artufel qui devrait prochainement - m'a-t-on dit - passer le flambeau des éditions Gros Textes mais vous citer quelques noms aux côtés desquels je suis fier de figurer pour célébrer ce « militant des autres poètes », « sauvagement libre » de Châteauroux-les-Alpes :

Thomas Vinau, Eric Dejaeger, Armand le Poète, Jean-Pierre Lesieur, Eric Dejaeger, Jean-Christophe Belleveaux, Georges Cathalo, Patrick Joquel, Jean-Claude Touzeil...

Je ne sais pas si cela suffit à se construire une famille, mais ce rassemblement-là me plaît pour célébrer à la fois ce poète et éditeur qui, le premier, m'a fait confiance.


Ce numéro reprend également des aphorismes issus des quatre-cinq recueils publiés par Yves Artufel ainsi que quelques textes inédits.

GrosTexteurs et GrosTextrices, curieux et curieuses, c'est ci-dessous qu'on trouvera le précieux sésame !
 
Revue Chiendents : 6 € toute commande + 3 € de frais de port.
Éditions du Petit Véhicule 20 rue du Coudray 44000 NANTES

samedi 11 février 2017

Louis-François Delisse a rejoint Artaud, Char et Michaux au ciel incendié des poètes

Louis-François Delisse
© photo Frédéric Loeb

Le poète Louis-François Delisse (1931-2017) est décédé dans la nuit du 6 au 7 février à l'âge de 85 ans à l'Hôpital Charles-Foix d'Ivry.
Je l'ai appris hier matin par le réseau de ses aficionados.
Affecté par cette triste nouvelle, je me sens bien incapable d'écrire quelque chose d'autre sur ce poète majeur que je n’ai pas déjà écrit ici ou là sur Poezibao
en 2009, la revue nord' en 2010 ou la revue eulalie 

du CRLL Nord-Pas-de-Calais en 2011.

Sur son parcours de « maudit » sans cesse éclipsé puis redécouvert, son compagnonnage toujours enthousiaste – du début des années 50 jusqu’au milieu des années 80 – avec les meilleurs peintres du Nord, avec lesquels il fréquenta la Galerie Dujardin (1905-1980) de Roubaix ou l’Atelier de la Monnaie de Lille, avant son départ pour le Niger en 1955, ses brefs allers-retours en France entre-temps, et son retour forcé et définitif en 1975.

Le compagnonnage des grands peintres du Nord et l'Amitié de la poésie

Galerie Dujardin Parmi tous les artistes qu'il a bien fréquentés et avec lesquels il a même collaboré illustrant de ses poèmes, tableaux ou assiettes, citons : son cousin-peintre et « Gémeau » Jacky Dodin, Arthur Van Hecke, Eugène Leroy, Jean Roulland, Eugène Dodeigne, Jean Brisy, Jean Parsy, Marco Outtier, Lyse Oudoire, Charles Gadenne, Louis Nahi, dernier artiste-témoin de cette effervescence-là, et Mahjoub Ben Bella.

J'ai envie d'évoquer aussi ici la confrérie fidèle de ses amies et amis, poètes, éditeurs, revuistes ou non, d'hier et d'aujourd'hui, qui ont accompagné son parcours en poésie à différents moments-clés de son existence et dont il me parla souvent, de près ou de loin, avec ferveur, dans sa voix ou dans sa correspondance : Albert Béguin, Albert Derasse, André Marissel, Guy Lévis Mano, René Char, Henri Michaux, Jimmy Gladiator, Guy Ferdinande, Pierre Peuchmaurd, Anne-Marie Beeckman, Michel Valprémy, François Leperlier, Jacques Josse, Cécile Odartchenko, Charles-Mézence Briseul, Françoise Favretto, Jean-Yves Bériou, Yvar Ch'Vavar, Marie-Odile Gain d'Enquin, Jean-Pierre Paraggio, Laurent Albarracin, Julien Stark, Anne-Marie Pédezert...

La  mort, Louis-François Delisse la défiait depuis longtemps, très présente, dès le début déjà, dans sa poésie dionysiaque « noire et blanche » – où Éros et Thanatos ont toujours fait jeu égal comme chez Alain Borne ou André Laude, par exemple.

Jusqu'au bout, Louis-François Delisse aura évoqué, adoré la poésie, son « seul dieu », et crié plus fort « devant les poubelles et le cercueil », « merde à la mort qui mord et pue » tout en embrassant et en embrasant l'existence sous toutes ses formes en laissant une œuvre forte, non consensuelle, « brûlante et éclatante » comme l'écrivit Laurent Albarracin, son parfait« biographe ».

Louis-François Delisse aurait aimé que je reprenne, en sa mémoire, un des meilleurs poèmes engagés de René Char consacré à Arthur Rimbaud, je crois. Le voici :


TU AS BIEN FAIT DE PARTIR ARTHUR RIMBAUD !
Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud ! Tes dix-huit ans réfractaires à l'amitié, à la malveillance, à la sottise des poètes de Paris ainsi qu'au ronronnement d'abeille stérile de ta famille ardennaise un peu folle, tu as bien fait de les éparpiller aux vents du large, de les jeter sous le couteau de leur précoce guillotine. Tu as eu raison d'abandonner le boulevard des paresseux, les estaminets des pisse-lyres, pour l'enfer des bêtes, pour le commerce des rusés et le bonjour des simples.
Cet élan absurde du corps et de l'âme, ce boulet de canon qui atteint sa cible en la faisant éclater, oui, c'est bien là la vie d'un homme ! On ne peut pas, au sortir de l'enfance, indéfiniment étrangler son prochain. Si les volcans changent peu de place, leur lave parcourt le grand vide du monde et lui apporte des vertus qui chantent dans ses plaies.
Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud ! Nous sommes quelques-uns à croire sans preuve le bonheur possible avec toi.

En complément : Un témoignage audio unique de Louis-François Delisse réalisé en 2013 par Cécile Odartchenko, éditrice de la monographie du poète parue en 2009 aux éditions des Vanneaux, collection Présence de la Poésie.

dimanche 5 février 2017

Realpoetik à Lyon

frederick-houdaer
Dimanche 23 janvier 2016 à 17 heures, j'ai été ravi de faire un bref aller-retour entre Lille et Lyon pour assister au Cabaret Poétique du Périscope qui a lieu plusieurs fois l'an, depuis 2010, à l'instigation du poète-éditeur Frédérick Houdaer.

Dans cette chaleureuse salle comble à taille humaine, beaucoup de poètes se sont déjà succédé, aînés (Pierre Tilman, Hervé Le Tellier, Zéno Bianu, Yves Artufel, Patrick Dubost, Jack Hirschman) et nouvelles générations (Frédérick Houdaer, NatYot, Jean Marc Flahaut, Marlène Tissot, Samantha Barendson, Thierry Roquet et Radière, Grégoire Damon, Simon Allonneau...).
 

Ce dimanche-là, une carte blanche a été donnée à la jeune revue de poésie en ligne Realpoetik initiée par Sammy Sapin et Grégoire Damon et à quelques-uns de ses meilleurs représentants : Émile Puyg (lu par Grégoire Damon), Laurent Bouisset, Pénélope Corps et Heptanes Fraxion.

Le dimanche après-midi à Lyon, ça a bien dépoté et ça nous a changés des mornes après-midis des années 80 avec feu Jacques Martin !

Heptanes Fraxion a envoyé du très lourd avec son recueil "Muer fait mal"

Grégoire Damon
Grégoire Damon a déboulonné Yves Bonnefoy avec le texte-brûlot de Puyg

Pénélope Corps
Pénélops Corps a renvoyé sa mère dans les cordes et rendu coup pour coup
aux cataclysmes ordinaires

laurent bouisset
Laurent Bouisset a éructé ses poèmes comme un tigre enragé !

le blog de Grégoire Damon
le blog de Sammy Sapin

le blog de Heptanes Fraxion
le blog de Penelope Corps
le blog de Laurent Bouisset

jeudi 2 février 2017

Je me souviens #6

À Éric, Gigi, Béa et Isa, François, Babic, Fred H., Thierry, Pater, Pierre,
Hervé V., Nathalie, Christine, Jean-Marc, Hervé D., Nicolas L. et B., Cyril,
David D. et C., Karine, Yvonne, Sophie, Thomas, Renaud, Anne, Céline et Christophe,
Sandra, Véro, Manu et tous les copains-copines d'alors,
mon frère, mes parents et leurs ami(e)s de ce beau temps-là...

monflanquin-camping-de-coulon-annees 80

Je me souviens des Soirées Loto du Camping municipal de Monflanquin où les familles se répandaient en longues tablées sur des tréteaux qui avaient été dressés à la hâte à travers toute la salle du Gymnase, espérant remporter le filet garni ou le sempiternel jambon de Bayonne.
Les familles, têtes baissées, avaient les yeux rivés sur leurs grilles de chiffres et posaient ou non, à l'aide de grains de maïs, le chiffre que le speaker annonçait au micro après avoir plongé la main dans une cage de fer où les balles numérotées caracolaient continuellement dans un bruit de roue libre.
Quand le jeu était bien engagé, en milieu de soirée, c'est généralement le moment opportun que nous choisissions, Éric B. et moi, pour nous poster à l'étage, près de l'escalier donnant directement vers la porte de sortie ouverte sur la rue.
« Au signal ! », nous projetions par-dessus la rambarde de pleines poignées de maïs qui s'écrasaient alors sur les tables en contrebas, tandis que nous dévalions déjà quatre à quatre les escaliers dans un énorme fou-rire de sales garnements, savourant notre forfait, au milieu de la nuit étoilée de nos rires. (Soirées Loto 1980-1982)

(Courts textes en cours, 2011-....)